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Breezak Interview

breezak

[photo: Bartosz Madejski]

“Je veux dire Mungo’s ils ont quand même commencé par vrais speakers qu’ils ont trouvés dans des poubelles quoi. Mais à l’époque, le sounds system des ghettos ou de la rue, il va commencer par littéralement une armoire. C’est leur bois, et ils vont clouer des planches dessus et ils vont mettre des speakers dedans.”


Longue interview avec Jérome (aka Breezak), l’homme derrière Bass Alliance Sound System et le sound system de Mungo’s Hifi. Discussion un peu plus technique, une sorte de B-A BA du fonctionnement d’un sound-system, le rôle de l’ingénieur, le choix des caissons et des réglages…

Alors, pour les débutants, est ce que c’est possible de résumer plus ou moins comment ça marche un sound system.

Je crois qu’on peut même commencer avant ça: pourquoi les gens amènent leur système [rires]

Allons-y alors :

La principale raison c’est que souvent tu n’as pas de sound system dans la salle. Donc quand tu veux faire une soirée, souvent n’y a pas de sound system dedans, ou alors si y’a un système, il ne sonne pas comme tu veux. C’est ça la raison principale pour laquelle tu amènes ton propre sound system.

Pour que tu puisses avoir le son que toi tu veux ?

Ouai voilà. Après, chaque groupe different, tout le monde à sa sono. Il y en a qui achètent des sonos toute faites, donc ils ont un son qui est parfait, qui est clair, de la marque qu’ils ont acheté.
Ou alors tu peux aller vers le home made sound system, donc comme nous, comme Iration… le sound system classique à la jamaïcaine. Donc souvent en partie fait maison, en partie des trucs qui sortent de chaines, des trucs de marque.

Traditionnellement [le sound system] ça va être les pré-amp avec la platine et les effets, l’ampli, et les speakers.

La caractéristique du sound system reggae ça va être une grosse basse déjà. Traditionnellement les caissons sont monté de manière en fonction de leur son : basse, medium et des aigus. Ça c’est la version traditionnelle 3 voies, donc ton pre-amp il coupe le son en trois. Et après avec la technologie maintenant tu peux faire ce que tu veux. Tu peux faire stéréo ou quoique ce soit.

Tu peux expliquer rapidement ce que c’est stéréo?

Traditionnellement le sound system reggae va être mono. Donc même si t’as deux stacks, les 2 stacks ne vont pas avoir une partie du son qui sort a gauche et l’autre a droite, ça va être tout en mono. Et même nous, on fait 2 stacks, même si on a la possibilité de faire en stéréo, on fait tout en mono.
Avec le nouveau matériel qu’on a, si je voulais je pourrais avoir 8 voies. Maintenant tu peux faire à peu près tout ce que tu veux. Avec l’arrivée du digital, et que c’est un peu moins cher, t’as plein de sound systems qui commencent avec un cross-over digital.

Donc dans les sound systems reggae de nos jours il y a deux écoles on va dire. Il y a ceux qui ont le pré-amp, et qui souvent maintenant sont à 4 voies. Donc même OBF maintenant ils sont à 4 voies je crois, mais ils ont un cross-over derrière qui coupe en 5.
Ou alors, nous ce qu’on fait c’est qu’on n’utilise pas de pre-amp, on a le mixer du DJ, et le selecta va faire les effets dessus.

On utilise que ce qui s’appelle un digital crossover, et la dedans tu rentres ton signal, et après ça ressors pour chaque caisson… Donc nous on est en 5 voies:  on a le sub ou le low bass qui va de 85 Hz jusqu’à 30Hz à peu près. Après t’as le upper bass, donc le kick, c’est entre 85 et 140Hz. C’est une bande qui est vraiment fine, et c’est juste le kick drum en fait. Si t’avait une batterie sur scène c’est là-dessus que ça tape.

Et après, pour avoir un peu plus de clarté, qui n’est pas vraiment old-school reggae,  c’est qu’on va avoir médium, haut-médium, et vraiment les aigus et tweeters en haut.

Donc en gros chaque voie correspond à chaque caisson?

Après, les voies elles correspondent mécaniquement à quelle boite tu vas avoir derrière. Donc ton signal il rentre de 20Hz à 20 kHz. Donc que si tu utilises un digital crossover ou que tu utilises un pre-amp, ce que tu coupes c’est pour avoir la fréquence optimale que le speaker va pouvoir reproduire.
Donc un scoop par exemple, tu pourrais  lui mettre un signal full-range dedans – donc tout ensemble – sauf que ça va sonner tous pourris dans les aigus. Mais il arrive un peu à reproduire le son.
Mais pour arriver à avoir un maximum de puissance et de clarté, le scoop, suivant les designs – le superscooper on pourrait mélanger, on pourrait avoir bass et upper-bass dessus, mais tu perds dans la clarté du son. Donc on leur met juste de 30Hz à 85Hz, et c’est là que le speaker dans la boite est optimal, en fait. Tu as le meilleur son à cette bande de fréquence.

Et suivant les speakers que tu utilises – donc nous  on utilise un setup qui est super standard de nos jours: 18 pouces sur la basse.

Des PD 18?

Ouai Precision Device PD 1850. Donc des speakers de 18 pouces c’est à peu près la base, le sub basse qui fait le mieux. Après pour le kick on utilise des 15 pouces, qui sont plus petits mais ils sont beaucoup plus rapides à reproduire le son.

Et aussi des médium 12 pouces, qui le standard aussi des anciens sound systems reggae.
Après au-dessus, c’est là la différence encore une fois avec la nouvelle technologie et tout. Souvent les anciens sound systems ils seraient passés de 12 à des Piezo ou à une série d’aigus. Nous ce qu’on fait c’est qu’on passe en 6.5 pouces, donc ça c’est les petits speakers avec une membrane. Et après on a un tweeter de 1 pouce, et ça c’est pas un speaker, c’est un compression driver, qui lui fait juste ce qu’il y a au-dessus de 4 KHz. Qui fait vraiment les aigus.  Tu as plusieurs types : l’ancien sound system reggae je dirai qu’il utilise des Piezos – qui est pareil, c’est pas un speaker à membrane, c’est une toute petite plaque qui va vibrer, qui va te donner des aigus super forts.

C’est pour ça que tu partages ton signal en fait, c’est pour utiliser le speaker – un compression driver, même les plus chers ils vont descendre peut être jusqu’à 500Hz, et ça c’est sur des gros trucs cher spécialisé qu’ils font maintenant. Donc c’est pour ça que tu es obligé de partager ton signal en fait, tu ne peux pas avoir un speaker qui fait toutes les fréquences à des volumes forts.

Par exemple, si tu regardes un ghetto blaster, t’as un speaker dedans. Et un ghetto blaster  on va dire qu’il va reproduire de 50Hz à 15KHz à peu près. Donc tu vas croire que ça fait toutes les fréquences mais ça marche qu’à un volume faible. Dès que tu veux un plus gros volume, il faut séparer par bande. Et plus tes bandes sont fines, tu prends un speaker et une boite qui est faite pour cette bande là, et tu peux vraiment avoir le meilleur son. Tu combines, tu fais ta rangée de basses, tes kicks, tes mediums, tes aigus… Et après ce qu’il faut faire avec tout ça c’est être sûr que ça marche ensemble.

Alors après c’est peut être un autre niveau.
Un sound system reggae va avoir beaucoup plus de couleurs, et un son plus – sans  que ça paraisse négatif, mais « muddy » on va dire. C’est plus chaud, c’est plus mélangé… C’est pas aussi net en fait. Pour l’oreille humaine, si c’est trop net, ça ne parait pas bien.

C’est pour ça que même avec les nouvelles technologies, tu peux avoir un son très, très net, ce qui sur le papier est de la bonne qualité, mais les gens vont pas aimer parce que le corps humain n’est pas habitué à ce que ça soit net. C’est trop clinique si c’est tout net.

Et donc quand tu as un pré-amp, en fait toutes tes fréquences vont dans les speakers en passant par les amplis. Le signal il est faible, il passe par les amplis, il est amplifié, il va dans les speakers. Mais avec l’acoustique, quand tu as un sound system, il y a un autre truc qu’il faut prendre en compte: c’est l’alignement. En fait le son quand il est créé par un speaker, il va sortir avec une certaine « longueur d’onde ».

Donc si tu as un scoop par exemple – alors là c’est encore plus complique le scoop [rires]

Le scoop, jusqu’à 85Hz – c’est pour ça que j’utilise 85Hz sur le PD – le son sort par l’arrière du speaker, passe par le ‘horn’ – les notre je crois qu’ils font 2m20. Donc en fait la horn va amplifier ton signal, va le rendre beaucoup plus fort, va permettre de diffuser le signal dans la salle beaucoup mieux. Mais ce qui ce passe c’est que quand le son sort de l’ampli, et qu’il va aller dans la salle, il est décalé par cette distance du speaker en lui-même, la distance du horn.
Donc quand tu es devant le speaker, le son il arrive – tu fais a la vitesse du son, c’est comme ça que tu mesures – donc si tu as 2 m de décalage, il va y avoir un délai avec un speaker 12 pouces qui lui fait face et qui sort directement.

Donc les basses auront le son un peu décalé :

Voilà, c’est un peu décalé. Ce qui peut donner un effet sympa si tout est bien fait, ou alors ça peut s’annuler, tu peux avoir des sons qui s’annulent. Après suivant les gens, c’est « a matter of taste ».

C’est pour ça souvent dans les free quand ils assemblent plein de caissons ensemble  ça s’annule?

Mettre plein de caissons de basse ensemble ça va pas forcément être plus fort si c’est pas les mêmes designs, ils peuvent carrément s’annuler.
Tu peux monter tes amplis et le son il descend. Je l’ai déjà fait par expérience ici, tu inverse les polarités, et en fait tu  llumes un scoop ça devient fort, t’en allume deux ça devient fort, t’en met un troisième ça réduit, et tu mets le 3 et le 4 en inverse, bin en fait tu réduis tout. Tu l’entends toujours parce que c’est dans la salle, mais en fait le son descend.

Donc ça c’est une autre chose qui est devenue possible avec les digital crossover, c’est que vu que tout passe en digital, tu peux aligner les sorties – le mien que j’ai ici, je rentre carrément la distance que j’ai à l’intérieur du speaker : donc je lui dit que mes scoops ils font 2m20, mes kicks ils font 80cm, et il aligne tout pour moi, pour que quand tu es devant dans la salle toute la wavelength de tous les speakers arrive en même temps à l’auditeur.

Donc tu n’as pas à tout régler manuellement

Je rentre les infos manuellement pour chaque speaker, mais je lui dis tel est la distance, ou alors met moi 10 millisecondes de délai et il le fait pour moi. Mais ça c’est une option qu’il n’y a pas sur les anciens pré-amp, et ce qui donne un effet qui est… tu pourrais dire que c’est bien, tu pourrais dire que c’est pas bien, ça dépend de ce que tu aimes.

Donc tu as tes coupures de fréquences, crossover, alignement, et il y a aussi ‘equalization’.
Une boite en elle-même, ou une combinaison de boites en fait, elles ne vont pas être tous au même volume, elles vont pas toutes avoir des bandes pareilles. Quand tu mets ‘l’équalizer’ dessus, tu peux équilibrer comme tu veux. Et la pareil, la différence entre digital crossover et pré-amp: de nos jours les grosses compagnies de touring qui font des sound systems dans les salles de concert, ils vont équilibrer un sound system qui fait de 40Hz à 20KHz, ils vont l’aligner exactement parfait – donc au niveau de l’alignement des speakers – et ce qu’ils vont faire aussi c’est mettre du ‘white noise’ – qui met toutes les fréquences au même volume. C’est pour ça que ça sonne assez… affreux.

Ce qu’ils font avec ça c’est équilibrer le systeme. La basse elle sera à la même intensité que les aigus, et c’est là qu’au niveau du reggae y’a le plus de reglages à faire, c’est vraiment en fonction de ton opinion et quelle musique tu joues, mais un sound system reggae n’est pas ce qu’ils appellent “flat”, plat.
Il va être beaucoup poussé sur la basse et sur les aigus. En général basse et aigus sont vachement remontés, A l’origine, dans roots il y a quasiment pas de kick .C’est pour ça que c’était les 3 voies à l’origine. En fait, au lieu de mettre un equalizer, ils avaient juste 3 boites, ça fait que les fréquences qu’ils n’avaient pas besoin, elles n’étaient même pas reproduites.

Donc plus la technologie s’ameliore, le système qu’on a je pourrais le faire complètement “flat”. Mais ça sonnerait pas reggae, ça sonnerait salle de concert, un son clair, net. Donc après tu rajoute un equalizer dessus, suivant quel ampli tu mets sur la basse ou sur le aigus. Différent amplis auront un différend timbre aussi. J’ai essayé plusieurs amplis de basse, on est plusieurs dans la scène reggae à utiliser les mêmes: les Void Infities 8, parce qu’ils ont un son qui est pas clean. Il y a un son en plus de la puissance, il donne une couleur au son.

Donc ça c’est pour tout ce qui est tweeking.
Après ce qui se passe là-dedans: Que tu utilises un crossover ou pré-amp, ça sépare ton signal, ça va à tous les amplis – là c’est pareil, tu peux choisir ce que tu veux comme marque pour avoir ton son – et après aux boites. Ça c’est la base.

Après, pour la source ça va être vinyle, avec une platine, 2 platines, un mixer ou pas. Après si tu as un MC et micro, tout ce qui va rajouter du caractère c’est quel effet tu vas mettre dessus, boite à effet, boite à sample, tout ce qui se rajoute par-dessus.

Ça c’est la théorie simple (rires)

Après, depuis le début ce que j’explique c’est dans les box. Les caissons, c’est là qu’il y a une autre partie de la magique de l’acoustique qui se passe.

Bin voilà, c’était la prochaine question: comment tu décides quel scoop, quel genre de caisson est mieux pour toi.

Voilà. Bin c’est là que ça devient très très compliqué. C’est de la physique, c’est de l’acoustique pure et dure. Un speaker il déplace de l’air. Et tu peux avoir un gros speaker – le plus gros que j’ai vu c’était 26 pouces – un gros speaker comme ça doit bouger beaucoup d’air.

Mais en fait non. C’est la combinaison du speaker en lui-même et de la boite. Parce que dans une grosse salle, tu peux mettre autant de PD18 qu’on utilise, par exemple, tu peux en mettre autant que veux, s’ils sont juste posés comme ça au châssis, qu’il n’y a pas la boite derrière, bin il y a rien qui va concentrer l’effet.

Le plus dur pour les gens qui design les box, et qui les fabriquent,  c’est ce qui se passe à l’intérieur de la boite, et le plus important c’est la combinaison du bon speaker et de la bonne boite. Parce qu’une très bonne boite avec un mauvais speaker dedans – et quand je dis mauvais ça veut pas dire faible – tu peux mettre un speaker de 2KW dans une boite et un autre de 500W, celui de 500W peut sonner mieux s’il est optimal pour la boite.
Et là il y a des calculs, c’est toute une histoire de volume et de “path”, le chemin que les ondes vont prendre.

C’est pour ça qu’ils essayent de rallonger l’espace derrière le speaker?

Bin la basse a une wavelength qui est super longue, donc il vaut mieux des boites avec des grosses horns. Tandis que les aigus c’est super court comme wavelength, donc ça peut sortir plus ou moins direct. Mais il faut quand même mettre un “guide” dessus, en plastique, et ça va te contrôler la dispersion.
Pour la basse, la dispersion…  ça sort de partout. Les aigus par contre sont vachement directionnels, donc tu as toujours un guide dessus.

Donc c’est là que la plus grosse partie du son, pour moi, c’est de là qu’elle vient. Et t’as plein de design de scoops différents, et si t’enlèves 5cm dans la chambre derrière le speaker, ça va totalement changer le son en sortie.

C’est pour ça sur tous les forums, t’as toujours un mec qui demande “j’ai acheté ce truc, je pense faire ce genre de caissons”, t’as les autres qui disent “ non ça va rien faire, choisis plutôt ce design…”

Voilà, et plus de Kilowatt veut pas dire un meilleur son. C’est vraiment la façon dont c’est mis ensemble. Et après bien sûr c’est “matter of taste”. Il y a des gens qui vont préférer un son comme ça, alors que d’autre non.

Surtout dans le reggae, l’importance de la basse c’est que les gens le sentent au lieux de l’entendre. Donc le design va beaucoup changer là-dessus. Un scoop par exemple est diffèrent d’une boite reflex. Donc reflex ton speaker est monté ‘plat’ devant, t’a une boite derrière qui crée le volume pour que l’air soit compressé derrière, et ça ressort directement par devant.
Comparé à un scoop ou ça passe par une horn et ça va ressortir après 2 mètres, et ça, ça va beaucoup plus créer de vibrations au sol, de vibrations dans les murs. Donc ce qui est bien pour le sentir sur le dancefloor, ce qui peut être un problème par exemple au Berkeley où avant ils avaient des boites reflex, il avait un bon son à l’intérieur on a jamais eu de problèmes – maintenant il y a des scoops, des Hogs, et le problème avec ça c’est que ça vibre beaucoup plus dans tout le bâtiment. Donc c’est pas forcement beaucoup plus fort à l’intérieur, mais la vibration créée par la boite est énorme, et les voisins maintenant ils se plaignent. Donc voilà, ça dépend de ce que tu veux faire.

Tout est dépendant de l’endroit où tu vas être. Apres il y a une grosse différence entre avoir une sono avec un bon son que tu aimes bien, et faire une sono pour une installation – où la tu fais attention à ce que ça soit bien à l’intérieur et que ça fasse pas chier les voisins.

Et du coup, le truc qui fait la différence entre votre sono et celle disons d’OBF ou Iration, c’est l’assemblage justement des différents composants.

Sur le principe elles sont toutes pareils, le principe est le même. C’est un « crossover, ampli, speaker ». Par contre la combinaison va être différente. Donc  moi j’utilise un digital crossover avec mes settings dedans, eux ils utilisent un pré-amp qui va avoir ses secrets. C’est le secret du pré-amp, tu ne sais pas vraiment ce qu’il y a dedans. Chaque pré-amp va être diffèrent suivant qui c’est qui les a faits, comment ils ont été prévus.

Les amplis ils vont donner une coloration au signal aussi, donc on utilise des amplis différents. Et les boites en sortie, chaque design change – je ne sais pas ce que eux ils utilisent exactement, mais je crois que c’est 18, 15, 12 et des tweeters en hauts, mais c’est pas du tout les mêmes boites que nous. Donc ça va sonner vraiment différent.

Donc c’est vraiment en fonction de ce que tu joues, de ce qui sonne mieux pour toi.

Ce qui est mieux pour toi, et aussi ce qui est à l’origine des sound systems reggae, en fonction de ce que tu trouves. Ce que tu peux t’acheter. Souvent, il y a beaucoup de choses que j’aimerais changer dans le son et que je ne change pas, c’est principalement une histoire de frais. Histoire de frais, d’habitudes, de raisons personnelles aussi – il y a des gens qui aiment bien utiliser ça, d’autres qui aiment bien utiliser d’autres… C’est très personnel.
Tout le monde va avoir un assemblage différent et un son différent, c’est ça qui fait aussi le charme du truc.

Mais ça nous est arrivé avec les Dub Smugglers, qui ont un assemblage qui est complètement différent du nôtre – on utilise tous les deux des digital crossovers mais ils n’ont pas le même que nous, ils ont des amplis différent, c’est des amplis complètement digital alors que nous on utilise des anciens encore, des lourds. Et les boites  sont des designs différents, des marques différentes pour les aigus et les médiums… Mais la façon dont ils l’ont réglé et la façon dont je l’ai réglé, on les a mis dans la même salle, et en fait on a un son super similaire en sortie. Ce qui est assez impressionnant quand tu vois que tout est différent.

Suivant ce que tu joues aussi, la musique que tu vas jouer va te donner les directions de comment tu “set-up” le son. Je sais que nous, même dans une session, entre le warm up et la fin, souvent je vais changer les settings. Si Tom il fait une sélection roots-ska avec des 7”, je vais vachement booster la basse et la tête des aigus, parce que le son à l’origine il est pas pareil.

Ton system suit ce que tu vas jouer en fait. Si tu joues une dernière production digital qui a été masterisé, on va dire bien poussé en studio, et bien sur le sound system le réglage va être plus près du ‘flat réponse’, du set up à zéro. Parce que la production en elle-même est déjà poussée pour avoir ce son-là.  Et ça se voit quand tu regardes les amplis, t’a toutes les indications d’une tracks à l’autre : tu vas avoir des changements énormes.

Il y a plusieurs sounds qui ont dit que quand tu produis une tune pour être joué sur ton system, et après tu la joue sur la sono de quelqu’un d’autre, ça change complètement.

Tom essaye ses morceaux dès qu’il peut sur le sound system. Et c’est vrai que les tracks qu’il joue sont masterisés principalement pour jouer dehors. Quand il va faire un master pour le mettre sur vinyle ou CD ça va pas être le même.
Et ça c’est l’avantage d’avoir 2 producteurs ici qui font la musique, c’est qu’ils font de la musique pour le sound aussi, ils savent comment ça va s’entendre quoi.
Dubsy et Chikuma ils venaient souvent faire les set-up avec moi pour tester leurs nouvelles tracks. Et des fois ça pouvait sonner bien en studio, mais ça sonnait dégeulasse sur la sono, il manquait quelque chose sur le sound system. Tu peux produire juste pour le sound system aussi.

C’est tout personnel, comment tu as envie, quand tu l’écoute fort en soirée, comment tu as envie que ça sonne. Ce que je fais souvent quand on a des gens qui jouent sur notre sound system, en soirée ou en festival – souvent c’est pas  que nous qui jouons dessus – c’est de jouer un peu avec le sound system. Soit voir avec eux, des fois il y a qui viennent me demander “fais que ça sonne comme ça” ou quoi, ou sinon s’ils nous disent rien on le fait pour que ça sonne comme nous on le veuille.

Donc c’est vraiment en fonction de qui joue, de comment la session se déroule.

En fonction de la salle aussi, en fonction de l’ambiance…

Tiens  voilà, par rapport à la salle. Par exemple à la Art School tu as mis la sono d’une certaine manière. Est-ce que c’est toujours comme ça, ou ça change en fonction d’où tu es?

Ça ça revient à la physique de l’acoustique, c’est qu’il y a une partie qui se passe dans la boite, et il y à l’autre partie dès que ça sort de la boite. Quand tu es dehors, on va dire qu’il y a moins de problèmes, parce que ça part dehors ça s’écarte. Donc c’est plus dur dehors d’avoir un son super intense. C’est là que souvent dehors on rajoute des stacks pour avoir plus de couverture.

En intérieur il y a deux choses. Avec le sound system reggae traditionnel, tu vas écouter ce que tu joue directement à partir des speakers. Ça c’est la différence du reggae par rapport à quand  tu vas a un concert, c’est que normalement les artistes sont sur scène, le sound system est devant eux, et sur scène tu fais confiance qu’à ton monitoring. Mais avec le sound system, tout le monde a au moins un stack tourné vers eux pour entendre comment ça se passe dans la salle.

Et après tu positionne les autres stacks pour couvrir au mieux la salle. Mais ce qu’il se passe dans une salle c’est qu’il y a du “bounce back”, des échos contre les murs… Donc si tu mets tes stacks à une mauvaise position ils vont s’annuler aussi, ou alors ça va créer des “dead spots”: quand tu traverses la salle, il a des endroits où la basse va être super intense, où elle s’additionne; et d’autres endroit où t’as des gros trous, t’as rien quoi. T’entends juste les aigus, parce qu’ils sont directionnels, mais la basse s’annule.

Donc il y a pleins de théories aussi, qui sont plus ou moins personnelles. La façon dont les salles de concerts le font: d’avoir la sono de chaque cote de la scène plus ou moins plat, c’est ce qui te donne le moins d’interférences, t’as le plus de chances de couvrir la salle bien.

Apres si tu veux t’entendre, tu mets un stack de côté, et il faut en avoir un autre qui est pas directement en face… je dirais 90 degrés ça marche à peu près. Mais souvent on en met un à coté de nous, un autre en face, on va allumer, marcher dans la salle et le pousser légèrement pour avoir le moins de dead spots possibles, pour avoir le plus de couverture.  Et ce que tu essayes de faire c’est de couvrir toute la salle, que les gens entendent à peu près au même niveau partout, et d’avoir au maximum de couverture de basse.

Et vous ne les mettez jamais en face de vous?

Ça dépend combien de stacks tu mets, si la salle est grande ou pas. Si c’est une petite salle souvent ce que j’aime bien c’est d’en faire un – comme ça t’as pas d’interférences, t’en met juste un dans le coin, et ce qui est bien avec le coin c’est qu’il amplifie ce qui ce passe dans ta boite, il va envoyer de la basse dans toute la salle. Donc quand tu mets un stack dans un coin, généralement t’as un meilleur résultat de basse. T’as une basse qui est plus forte dans toute la salle.
Le plus simple c’est un seul stack.

En extérieur, si c’est pas une trop grosse foule, un seul stack c’est le plus simple, t’as pas d’interférences, t’as une bonne couverture, et c’est simple à gérer.
Après si tu veux couvrir une grosse scène, tu multiplie, un, deux, trois… et quand tu regardes, ils sont toujours à des angles, t’essayes d’éviter les face à face. Si t’a un face à face mais qu’ils sont loin l’un de l’autre, tu ne vas pas arriver à la zone d’interférence au milieu. Mais tu ne peux pas faire face à face trop près.

Nous on n’est pas trop fan du stack en face, par rapport peut être aux sons plus roots, parce que les sons roots ce qu’ils aiment bien c’est que t’en ai un sur le côté qu’ils entendent, un au fond qui leur revient vers eux.

Ce qu’il se passe avec ça, c’est que quand t’es à la position de sélecta, de DJ, tu vas avoir un son qui a plus de délai. Donc si tu sélectionne à la Shaka, ou Channel One, ou Aba Shanti, ils ne mixent pas les tunes. Mais si tu mixe, tu ne veux pas avoir de délai. Je pense que c’est ça la différence, pourquoi nous on en met pas souvent en face, c’est que ça devient un problème quand tu mixe et que tu veux caler deux vinyles en temps, le troisième stack en face il t’emmerde un peu [rires]

Oui c’est vrai que c’est logique. Les potes en France ils jouent tous avec leur sono en face mais ils utilisent qu’une platine

Ouai, si t’as une platine, c’est bien de l’avoir en face t’entends très bien le son. Et tu t’en fous, quand t’arrête t’as pas ce petit délai de quelques millisecondes, c’est pas grave.

Donc souvent quand ils mixent, ils ont des moniteurs en plus au niveau des platines. Quand tu les allumes t’entend pas le son du sound system, t’es dans ta petite bulle et la t’as un son qui est aligné avec ce qui sort du mixer. Parce que le son du DJ qui va à un troisième stack, quand il te revient à toi, le temps qu’il passe par tous les amplis, 30m de câbles et à travers une salle, t’as un délai. Donc si tu essayes de mixer, tu peux pas.

Donc ça c’est pareil suivant si ça va être des DJ qui mixent, ou si c’est des gens qui font de la sélection pure et dure, c’est ça qui va changer comment tu mets tes speakers.
Mais en général c’est avoir la meilleure couverture, et le meilleur son possible partout.

Après, le côté home made – ça change quoi et ça apporte quoi?

c’est l’identité du sound system. Quand tu regardes les vieilles boites, il en a une qui est venue sur ebay récemment, elle est peinte à la main, tu vois que ça a été fait…  Je veux dire Mungo’s ils ont quand même commencé par des speakers qu’ils ont trouvés dans des poubelles quoi. Mais à l’époque, le sound system des ghettos ou de la rue, il va commencer par littéralement une armoire. C’est leur bois, et ils vont clouer des planches dessus et ils vont mettre des speakers dedans. Donc l’aspect home-made, tu as cet aspect que tu l’as fait toi-même, c’est ton sound system, et quand tu vas le sortir en soirée les gens le reconnaissent. Ca a à voir avec l’identité, et aussi ce qui est bien avec home-made c’est que tu peux faire le son que tu veux.

De nos jours, tu peux acheter des speakers d’usine, qui sont fabriqués. Les superscoopers qu’on a c’est un design – c’est pas le nôtre – mais après on les a fait nous-même donc on peut faire la finition qu’on veut dessus, les grilles qu’on veut.
Et après t’es pas dépendant. Si t’achètes une marque, tu vas avoir le son de cette marque là, sur la basse et sur les aigus. L’aspect home-made, même si tu achètes d’une marque, c’est que tu peux combiner. Nous nos têtes, enfin,  nos mediums et aigus c’est des Voids, et même si c’est une boite que j’ai acheté à Void, j’ai changé les speakers . Ils seront sans doute pas d’accord, mais j’ai mis d’autres speakers dedans que je trouve sonnent mieux.

Donc tu peux improviser, tu n’es pas restreint :

Ouai l’aspect home-made c’est surtout ça, c’est de ne pas être restreint au son d’une marque, de faire ce que tu veux, et de faire l’aspect que tu veux : donc couleur, peinture…

C’était Albah des Welders qui a fait la remarque que tu peux deviner si un sound system joue roots, ou steppas ou quoi en fonction de son apparence.

Ouai par le look. C’est ce que je disais par rapport à l’ancien système 3 voies. Si quelqu’un a beaucoup de Piezos, qui a une range de médiums et des scoops, tu vas te dire ils vont faire plus du roots ou du dub. S’ils ont gaugés pleins de subs et plein de tops, tu vas te dire ils sont plus steppas.
Nous je pense que ce qui est bien avec notre son et et pourquoi ils nous reservent souvent sur des festivals, c’est qu’il est polyvalent. On va pouvoir jouer du roots dessus, je mets mon roots setting dedans. On peut jouer du steppas, on peut jouer du dubstep… Drum and bass, j’ai fait pas mal de soirées drum & bass,  je me suis aperçu que les gens qui jouent de l’ancienne drum and bass ça passent pas bien sur notre system. Donc tu ‘tweek’, et ça sonne mieux.

Mais l’aspect visuel il est important – ouai l’identité du sound system. Si tu le mets à un endroit, dans une salle, s’il y a un Sound clash, on le voit.
Si tu regardes King Earthquake. King Earthquake il a un très beau finish, c’est peint.

Ouai et puis tu vois directement que lui c’est du gros steppa.

Ouai même le look des boites, c’est carré, il y a des grosses grilles, c’est peint en camouflage. Tu vois une photo même d’une seule boite du sound, même pas tout le sound system, tu sais que c’est une boite King Earthquake.

Et puis à cote de ça tu regardes Channel One, c’est tout en bois, les grilles sont rondes – ça donne plus roots

Et un peu de mélange de plusieurs boites différentes, tu vois que c’est pas toutes du même design, de la même année. Nous on a essayés, les boites au début elles étaient violettes. Donc on les a poncés, pour que ça aille avec le reste. Donc là du coup les gens reconnaissent que c’est Void, mais ils savent c’est des Void Mungo’s [rires].
Même quand  tu regardes sur le forum “speakerplan”, il y a des gens qui s’étonnent des combinaisons de speakers qu’on utilise, et j’ai vu des commentaires “mungo’s do it and it sound good” [rires]. Et il y a des gens qui disent non tu ne peux pas faire ça. Mais c’est la façon dont on les coupés et tout.

Quand tu regardes les boites OBF, elles ont leurs ‘stencils’ dessus, leurs couleurs à eux… C’est bien en clash cet aspect identité du son. Et puis ça fait partie de notre logo, tu regardes le logo Mungo’s, tu créé une identité avec ça.

Ouai c’est ta marque en fait.

Ouai ça devient ta marque. Quand tu vas dans une salle de concert tu peux reconnaitre DNB avec des boites carrées sur les côtes avec le petit logo, et bien les reggae sound systems ils ont leur look.
Si tu veux un bon exemple, c’est en Allemagne, Dandelion Sound System. Et eux ils ont carrément passé du temps. C’est un boulot d’ébéniste. Et c’est un super boulot.
Il y a des gens, je sais plus où, qui dans leur scoop, la croix dans le scoop en bas – elle est purement structurelle – mais ils ont fait une étoile. Je sais plus où c’est. Mais c’est des petits détails qui font tout. Et puis c’est beau, c’est l’aspect esthétique.

Ouai, ça change du truc d’usine, de chaine où tout se ressemble.

En salle de concert les gens ils viennent pour regarder ce qu’il se passe sur scène. Ils s’en foutent du sound system. Dans les soirées reggae, le sound system il est à part entière. Souvent ça m’est arrivé d’installer le sound system sur la scène, et les DJ sur le cote. Et ce que les gens ils regardent c’est le sound system, ils l’ont devant, ils l’entendent nickel. T’as moins ce point focal sur le DJ ou sur le groupe de musique, ça va être la sono. En France le plus d’ailleurs, les gens regardent pas le DJ, ils sont la tête vers le son.

Ils y en a plusieurs qui ont parlé de ça justement, et comme quoi ça venait de la culture ‘teuf’.

Ouai en teuf, mais parce qu’en teuf ils mettent toujours le DJ derrière le son. Le DJ c’est pas forcément ce que les mecs veulent regarder.  Mais ouai, en session, le son il est près des gens.

Ouai les gens viennent pour le son

D’où l’intérêt de le faire custom, de le faire home-made, d’avoir un look différent.
Et aussi au niveau prix. Au niveau prix tu peux faire un sound system custom pour beaucoup moins d’argent qu’un sound system que tu achèterais. Si tu vas à un magasin et tu leur commande un sound system avec tels spécificités, ça va te revenir beaucoup plus cher que si tu le fais toi-même, que tu achètes ton bois, tu assemble…
il y a toujours cet aspect aussi que les sound reggae ils démarrent pas avec plein d’argent.

Ouai ça se saurait !

Après tu peux aller plus loin dans le home-made – nous on n’a pas les connaissances, il y a personne ici qui fait ça – mais tu peux même aller jusqu’au point de designer tes propres boites, tes propres speakers, de faire tes propres amplis, ton propre pre-amp. Ça c’est le côté plus électronique, où la vraiment tu construis de A à Z. Là c’est le next level home-made, c’est les amplis Jah Tubbys…

Il y a des plans, tu t’inspires de plans ou si vraiment t’es bon en électronique tu peux commencer de zéro – mais bon, c’est dur. Mais tu peux créer vraiment tout toi-même.
Après nous on fait beaucoup de route, on fait pas mal de touring et tout, il y a quelque chose quand tu l’achète de quelqu’un qui a une équipe de design et développement, et qui va être testé, c’est mieux. Parce que si tu le fait toi même, il n’y a pas cette garantie que ça tienne.

Après home made, tu es toujours en train de changer de trucs. Tu peux, un an après l’avoir testé sur les routes et en soirée, dire “ah non en fait, je préférais ça avant”, ou “tiens il y a ce produit-là qui est sorti”. Tu le test, ça évolue. L’aspect home-made c’est que tu peux évoluer pièce par pièce, t’es pas obligé de tout changer – et ça c’est ce que tu ne peux pas faire avec un sound system tout fait, d’usine. C’est soit tu dois tout changer, ou tu gardes. Tandis que si c’est home-made tu peux changer au fur et à mesure, tu ajoutes des trucs…

Après tu me disais comment tu règles ta sono dans les soirées, tu dis que tu le fais au feeling, c’est différent de ce que fait un ingé son en concert ?

Ça va être vraiment au feeling à chaque moment, même à quel setting tu commences. Si c’est une soirée bien longue qui commence avec peu de gens, tu vas commencer tranquille. Si les gens ils arrivent tous d’un coup, même au niveau de l’équilibre; tu peux amener les gens à danser si tu commences bien. Des fois ce que je regrette à des danses c’est que tu ne peux pas commencer avec tout à fond, il faut amener les gens à danser devant le système. C’est comme si tu les attire avec le sound system et une fois qu’ils sont chauds, et bien là tu peux pousser.
Et c’est autant le rôle de l’ingénieur en soirée que le rôle du sélecta aussi.

Le fait de lire la foule ?

Bin les anciens sound systems roots il n’y avait qu’une personne, qui était le sélecta et l’ingénieur – il va pousser son system en même temps qu’il fait sa sélection. Maintenant avec les DJ c’est plus moi qui vais faire l’ingénieur derrière et les DJ qui font la sélection. Et souvent on s’entend, on sait par rapport au flow des soirées – souvent Craig et Tom ils me font des petits signes, et puis je sais quel tune arrive, à quel moment elle va tomber. Si c’est une grosse tune du moment, c’est là que donne tout à ton system.

Donc déjà il faut que tu arrives à lire la foule, et après il faut que tu arrives à bien t’entendre avec l’équipe.

Et petit à petit tu connais bien ton system. Tu arrives à le pousser. Moi je le pousse hors des limites, mais tu ne peux pas faire ça tout le temps, donc il faut juste lui donner un petit coup. C’est même un des risque auquel on revient de plus en plus au fil des années, et c’est peut-être aussi parce que je vais à de plus en plus de sessions. Mais c’est le danger de trop pousser vers la fin, ça deviens trop fort pour les gens.

Ouai c’est vrai je me souviens pour la session à Stéréo au nouvel an, la salle en bas j’avais du mal à rester dedans.

En bas c’est une salle en béton, c’est cubique, tu t’en prends en plein la gueule. Et d’ailleurs ça a été trop poussé, et c’est ma faute j’étais pas aux deux endroits en même temps. Il y a eu deux speakers de mort à Stereo [rires]. Bon ils étaient vieux, ils auraient pu mourir le mois d’avant le mois d’après.
C’est des caissons qui sont pas fait pour un endroit aussi petit que ça, c’était pas notre idéal Stéréo pour ça.
Mais ouai, c’est faire évoluer la soirée avec la sélection, que ça soit au niveau du volume, de l’équilibre, et pas trop pousser. Après il y a toujours plein de gens qui vont te demander de mettre plus fort, parce qu’ils y a des gens qui en veulent toujours plus, mais il y a des gens qui te disent aussi le lendemain « ouai c’était un peu trop fort ».

Donc il faut garder un bon équilibre des deux, que ça soit des sessions fortes ou tu puisses sentir la vibes, mais aussi on fait de plus en plus attention maintenant, c’est qu’il faut faire attention à nos gens [rires]. Et je crois qu’il y a des plus en plus de sound system qui tournent – enfin je sais pas s’il y en a de plus en plus, ou c’est juste que je fais plus attention – mais il y a de plus en plus de sound qui poussent tout le temps. Et personnellement j’aime bien commencer tranquille, aller fort et puis finir quoi. Il y a des gens ils ont le sound system, bam ! Ils vont commencer direct fort. C’est pas parce que c’est une session sound system qu’il faut que ça soit fort du début à la fin.
Le sound system c’est un bon outil mais ça peut être dangereux aussi – faut faire attention quoi.

Souvent la remarque faite aux sound systems c’est qu’ils jouent à des niveaux au-dessus de la limite – disons le niveau ‘acceptable’ définit par les salles.

Souvent les sound systems reggae paraissent super fort mais c’est par rapport à la basse. Souvent il y a des plaintes, c’est par rapport à la basse. Souvent on est en-dessous des seuils limites, mais on va être beaucoup plus fort dans les basses, dans d’autres bandes de fréquences.

Souvent les bandes de fréquences qui font mal aux oreilles aux alentours des 2KHz, souvent je les descends. Les médiums, aigus tout ça, c’est des fréquences que si elles sont trop fortes pendant peu de temps ça peut créer des dommages aux oreilles. Par contre au niveau des basses, avant d’atteindre ces niveaux-là qui font mal – déjà c’est beaucoup plus dur à reproduire. Et même en soit ça va pas t’abimer quoi que ce soit. Donc ça va paraître au-dessus des limite théorique, « health and safety » et tout ça ; mais en fait t’es en dessous parce que les fréquences qui font mal et tout ça elles sont descendus.

Donc ça c’est à nous de régler et tout, et le reggae en générale ce qui est bien c’est que c’est pas une musique qui fait trop mal aux oreilles. Si tu compares un concert rock et une soirée reggae à même volume, t’auras plus mal au concert rock. Et ça, ça vient aussi de la qualité du signal, de la distorsion. Une guitare électrique avec de la distorsion dedans, c’est du signal carré, ça va t’exploser les tympans quoi. Tandis qu’une grosse basse dub, une grosse basse ronde tu vas le sentir donc ça vas paraître vachement fort – mais sans être dans des zones qui ne peuvent faire mal.

Un des bouquins que je lis pour le mémoire c’est une étude de Stone Love sound system en Jamaïque – c’est un PHD donc vachement technique, c’est pointu sur l’acoustique et tout – mais un des trucs qu’il argumentait c’est que les sounds systems vont à l’encontre des idées générale de la ‘modernité’ où le visuel prime sur tout. Dans une soirée reggae c’est le son qui prend le dessus. Alors que même un concert, si tu fermes les yeux tu rate une partie de la performance.

Ouai tu peux fermer les yeux et tu écoutes. En concert il y a le coté performance des gens qui vont bouger, jouer et tout.

Et puis surtout tu vas sentir la musique, pas seulement l’entendre.

Bin c’est le mieux d’avoir des sound systems comme ça, des fois certaines musiques ont des lignes de basse que tu vas sentir, ça te donne un frisson – il y a tellement de vibrations. Je sais pas si ça t’es déjà arrivé, moi ça m’est arrivé des fois de le faire moi-même et de me donner des frissons. Tu le sens quoi. Et  les gens ils adorent, ils viennent pour ça, c’est clair.

Et voilà, après ça reviens à un problème, c’est d’expliquer ça à quelqu’un qui n’a jamais été en session.

Il y a quelque chose – il faut y aller. C’est l’expérience. Là les gens à Leicester où on a joué ce week end, on regardait les commentaires facebook, les gens ils disaient « you could feel the bass ». A chaque fois les commentaires après les sessions c’est sur ce que les gens ont ressentis, que tu n’as pas forcément à d’autres concerts.
Tu as les deux, tu as la musique et tu as cet aspect sensoriel, qui est dur à expliquer. Et aussi c’est ce qui me rend accro.

A.F